Mercredi 15 août 2012. Butrint et Saranda


Chapitre 13 sur 16.
(37 pages et 35 photos dans la version complète)

Extrait :



L’heure du crime est-elle passée ? Est-on bien le 15 août ? Oui ? Alors on peut le dire : bonne fête Muriel ! Bonne fête Maman ! OK, d’accord, la journée aurait pu commencer encore mieux si l’on n’avait pas eu à pique-niquer dans la chambre pour le petit déjeuner, mais bon... C’est comme ça. On avait ce qu’il fallait pour manger et l’important était malgré tout d’avoir ce petit quelque chose dans le ventre avant de partir pour notre excursion du jour sur le site archéologique de Butrint.

Situé dans le parc national du même nom, l’endroit n’est qu’à soixante-dix kilomètres environ de Gjirokaster. Compter donc le double pour l’aller-retour, encore qu’il ne soit peut-être pas judicieux d’évaluer la distance en kilomètres : il vaut mieux compter en temps à cause de l’état des routes, possiblement catastrophique comme on a pu le constater la veille ! En tout état de cause, on ne devait pas avoir trop de voiture à faire, et ça, c’était une bonne chose, que chacun accueillait avec enthousiasme. Le temps qu’on ne passe pas dans la voiture, c’est autant de temps passé à faire et à voir d’autres choses !

Hautement touristique, le site de Butrint est un incontournable pour les gens qui visitent l’Albanie du sud, mais c’est depuis plusieurs années aussi une excursion proposée assez naturellement aux touristes séjournant sur l’île grecque de Corfou. La distance entre Kerkyra (Corfou) et Butrint ne mesure en effet qu’une cinquantaine de kilomètres (une vingtaine à vol d’oiseau) : deux tiers par le ferry entre Kerkyra et Saranda et le troisième tiers par la route, côté albanais. A noter qu’il n’y a que deux kilomètres d’une rive à l’autre à l’endroit où l’île grecque est la plus proche du continent. C’est non loin de là qu’un « gentil organisateur » du Club Med de Corfou a été tué en 1984 pour avoir longé d’un peu trop près la côte albanaise avec son hors-bord, à l’époque où quiconque franchissait la frontière albanaise (maritime ou terrestre), même sans le savoir, était abattu à vue et sans sommations !

Une fois prêts à partir, nous avons fermé nos deux chambres et nous sommes descendus. On espérait ne pas retrouver notre réceptionniste d’hier et avoir affaire à quelqu’un qui l’aurait remplacé, mais non. Par-dessus le marché, à notre grand étonnement, notre homme nous a demandé de payer pour notre première nuit ! Avait-il eu le pressentiment qu’on pourrait, parce qu’on avait été échaudés, quitter les lieux prématurément ? Changer d’hôtel est une option qui a dû nous passer par la tête mais il était hors de question, d’une part, qu’on parte sans payer au risque de se faire pincer d’une manière ou d’une autre, et d’autre part qu’on perde du temps à prospecter pour trouver un autre endroit où dormir alors qu’on avait mieux et plus intéressant à faire. L’affaire n’était pas si grave que ça, après tout, même si elle était agaçante... Bref, on a docilement payé notre première nuit et donc déboursé les soixante euros demandés, mais en se jurant d’aller dans un cybercafé à notre retour, en fin de journée, pour écrire un mail de mécontentement, en espérant que la personne qui nous lirait (ça ne serait pas notre réceptionniste non anglophone) serait celle qui nous avait indiqué que le prix s’entendait avec petit déjeuner inclus...

Notre voyage vers Butrint nous a fait redescendre en voiture vers le sud, sur la route par laquelle on était la veille arrivés de Grèce à Gjirokaster. On la savait de bonne qualité : c’était autant de kilomètres parcourus sans souci ! Et finalement, c’est le trajet dans son ensemble qui a été correct. Ah, je ne dis pas qu’il n’était pas parfois un peu tortueux, qu’il n’y a pas eu ici ou là un croisement difficile avec les véhicules arrivant d’en face ou un tronçon un peu plus tape-cul que les autres, mais dans l’ensemble, tout s’est bien passé. On s’est d’ailleurs fait la remarque que cet itinéraire, fréquenté notamment par les touristes venant de Grèce et se rendant à Butrint et/ou à Gjirokaster, était à ce titre sûrement mieux entretenu que beaucoup d’autres !

Le souci de la qualité de la route en moins à appréhender, c’est plus sereinement que l’on peut prêter attention, tout en roulant, à ce qui nous entoure. A nous donc la contemplation de ces belles montagnes caillouteuses et arides qui nous entouraient ! Telles des vaches maigres dont on peut voir les côtes saillir, ces reliefs révélaient de fines strates géologiques qui les striaient en diagonale, créant parfois l’impression, selon le sens dans lequel on avançait, que la route avait une pente différente de ce qu’elle était en réalité ! Sur ces chiches versants, on a vu à plusieurs reprises des troupeaux paître : des troupeaux de vaches, ou de moutons... Des animaux qu’on trouvait aussi parfois au beau milieu de la chaussée, véritables obstacles mobiles qu’il vaut mieux apercevoir de loin plutôt que de tomber nez à nez avec eux à la sortie d’un virage !


De hauts et arides reliefs...


Après avoir passé la localité répondant au nom évocateur de Mesopotam sur la route E853, après avoir vu ici un petit complexe industriel style station d’épuration fatiguée et là un terrain ressemblant à un camp de réfugiés grouillant de monde s’affairant autour de tentes de fortune, on est arrivés à proximité de Saranda qu’il nous fallait traverser. Pour entrer dans cette ville, on a dû monter une rampe assez impressionnante. Composée de cailloux clairs, elle était sous le soleil d’un blanc éblouissant. Et parce qu’elle était courbe, qu’elle était bien pentue, assez peu large et complètement décroûtée (du genre à lisser vos pneus pour cause de patinage dans les graviers !), la circulation s’y faisait automatiquement... dans la discipline ! En effet, s’y croiser semblait hasardeux et les conducteurs ne s’engageaient donc pas dessus sans avoir laissé quelques véhicules d’en face passer et laisser la voie momentanément libre. On aurait pu comparer ça à un toboggan de piscine : avec en haut des gens attendant leur tour en file indienne pour descendre. Et en même temps à un remonte-pente avec sa file de gens patientant avant de monter ! Il a fallu s’armer d’un peu de patience avant que vienne notre tour et qu’on puisse entrer dans la ville. Oh, on n’a trop rien vu de Saranda, du moins lors de ce trajet aller. Mais on y reviendrait, après avoir visité Butrint. A ce moment-là, on se concentrait surtout pour tenter de repérer les rares panneaux indiquant la direction de Butrint : de simples panneaux de bois peints en blanc avec dessus des inscriptions peintes en noir ; des panneaux qui se cachaient dans le paysage urbain, des panneaux de la qualité de ceux que les associations mettent en place sur des poteaux à l’aide de fil de fer pour annoncer leur prochain loto ou leur prochaine brocante !

Après Saranda, la route court entre le littoral et le lac de Butrint (Liqeni i Butrinti). Elle traverse enfin la petite ville de Ksamil avant de dérouler devant les visiteurs ses tout derniers kilomètres au top du confort routier : une chaussée démesurément large et un tapis de revêtement en enrobés tout beau tout propre.


Vu depuis le parking du site archéologique : le bac faisant lien entre les deux rives du canal Vivari.


Le parking du site est gratuit. Il faut dire qu’il n’est pas aménagé. C’est une grande plateforme caillouteuse sur laquelle chacun se gare un peu comme il veut, ou comme il peut, en fonction de la position des autres. L’entrée piétonne du site n’est alors plus qu’à quelques pas. Passée une grille, nous achetons nos cinq tickets au guichet. En papier bristol et au format carte de crédit, ces tickets ont tous une face blanche mentionnant le prix, la date et d’autres choses encore. Sur l’autre est imprimée une photo du site. Ces photos pouvant être différentes, elles font de ces tickets de beaux petits souvenirs à garder ! Une fois à l’intérieur, nous chercherons tout d’abord des toilettes afin de ne plus être dérangés par une envie pressante pendant la visite. On en trouvera non loin, et propres.


La tour vénitienne visible au tout début du parcours.


Le site archéologique occupe toute la surface d’une presqu’île baignant dans les eaux du lac de Butrint, mais c’est aussi tout le secteur alentour qui réserve des points d’intérêt pour les passionnés de vieilles pierres. Répartis autour du site archéologique proprement dit sur un territoire qui fait le Parc National de Butrint, ces points d’intérêt sont tous accessibles par des chemins de randonnée. Le lac de Butrint communique avec un autre lac plus petit, le lac de Bufit, et avec la mer Méditerranée grâce au canal Vivari. D’un côté de ce canal se trouve le Fort Triangle (non loin du bac) et de l’autre, côté mer, une citadelle construite par Ali Pasha en 1807 sur une petite île proche. Comme sur d’autres sites archéologiques européens, on peut voir à Butrint des vestiges de différentes époques. Ainsi, la tour vénitienne qu’on voit dès le début de la visite est plus moderne que les ruines qu’on découvre ensuite.

Le site dit « principal » de Butrint (celui qu’on a visité) est exceptionnel et deux de ses atouts y font pour beaucoup. Le premier, c’est son cadre, et le second, c’est la diversité des vestiges à y découvrir. Un chemin existe qui permet d’ailleurs aux visiteurs de parcourir l’endroit de manière à passer à proximité du maximum de centres d’intérêt. Un peu comme dans les magasins Ikéa où un itinéraire est imposé tout en donnant l’impression au client de se promener ! Et le site est très arboré, ce qui fait qu’on trouve toujours assez d’ombre pour tout le monde sur le parcours, et ce qui permet, détail non négligeable, de profiter des lieux même par grosse chaleur, à l’abri des feuillages que le vent marin fait chanter.


Butrint : les vestiges de la ville basse.



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